--- /dev/null jeu. janv. 01 00:00:00 1970 +0000
+++ b/Texts/LaFontaine/le_chêne_et_le_roseau.txt mer. mai 30 18:21:13 2012 +0200
@@ -0,0 +1,34 @@
+LE CHÊNE ET LE ROSEAU
+
+Le chêne un jour dit au roseau :
+"Vous avez bien sujet d'accuser la nature ;
+Un roitelet pour vous est un pesant fardeau ;
+Le moindre vent qui d'aventure
+Fait rider la face de l'eau,
+Vous oblige à baisser la tête.
+Cependant que mon front, au Caucase pareil,
+Non content d'arrêter les rayons du soleil,
+Brave l'effort de la tempête.
+Tout vous est aquilon ; tout me semble zéphyr.
+Encor si vous naissiez à l'abri du feuillage
+Dont je couvre le voisinage,
+Vous n'auriez pas tant à souffrir :
+Je vous défendrai de l'orage ;
+Mais vous naissez le plus souvent
+Sur les humides bords des royaumes du vent.
+La nature envers vous me semble bien injuste.
+- Votre compassion, lui répondit l'arbuste,
+Part d'un bon naturel ; mais quittez ce souci :
+Les vents me sont moins qu'à vous redoutables ;
+Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu'ici
+Contre leurs coups épouvantables
+Résisté sans courber le dos ;
+Mais attendons la fin." Comme il disait ces mots,
+Du bout de l'horizon accourt avec furie
+Le plus terrible des enfants
+Que le nord eût porté jusque là dans ses flancs.
+L'arbre tient bon ; le roseau plie.
+Le vent redouble ses efforts,
+Et fait si bien qu'il déracine
+Celui de qui la tête au ciel était voisine,
+Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts.